Microscope à thermoréflectance pour la mesure de la température d'un circuit intégré.
La présente invention concerne la mesure de température point à point d'un circuit intégré, ce qui nécessite, compte tenu de la dimension actuelle des composants de tels circuits, une résolution spatiale submicronique, de l'ordre de 200 nm.
L'augmentation de la densité d'intégration des circuits intégrés à semiconducteur fait de échauffement et de la dissipation de la chaleur des problèmes majeurs. Des outils d'imagerie thermique à très haute résolution sont donc nécessaires pour mesurer ces échauffements et détecter les éventuels points chauds qui peuvent être des sources de défaillances. Ces outils sont utilisés aussi bien en amont, pour permettre aux concepteurs de circuits intégrés de valider leurs modèles de propagation de la chaleur à petite échelle en détectant les points chauds sur des prototypes, qu'en aval, pour permettre aux fabricants de tester ces produits, d'en évaluer la qualité et d'en prévoir les risques de défaillances.
Les mesures optiques utilisées actuellement sont effectuées soit dans le domaine infrarouge, soit dans le visible. La thermographie infrarouge est d'utilisation courante mais présente l'inconvénient d'une résolution de quelques micromètres. Les méthodes spectroscopiques telles que l'effet Raman ou la photoluminescence utilisant des longueurs d'onde du spectre visible offrent une résolution de l'ordre du micromètre mais présentent l'inconvénient de n'être adaptées qu'à certains types de matériaux. Les mesures de thermoréflectance sont fondées sur le principe suivant : lorsque la température d'une surface varie de ΔT, le coefficient de réflexion R de cette surface est modifié d'une quantité ΔR = ΔT x δR/δT. La mesure optique de ΔR et la connaissance préalable (éventuellement par étalonnage) du coefficient δR/δT permettent donc de connaître l'élévation de température ΔT. Pour accéder à une mesure quantitative de la température par thermoréflectance, il est bien entendu nécessaire de prendre en compte le coefficient de thermoréflectance de l'objet observé, ici des circuits. Or, les circuits intégrés sont constitués de différents matériaux. Pour une même température, chacun de ces matériaux délivre un signal de thermoréflectance différent. Il est donc généralement considéré comme nécessaire de procéder à une opération de calibrage pour chacun des matériaux ou empilements de
matériaux présents dans le circuit mesuré. La présence simultanée de dizaines de matériaux sur les circuits actuels rend cette opération longue et délicate.
Lors de leur fabrication, la plupart des circuits intégrés sont maintenant protégés par une couche dite de passivation ou encore d'encapsulation destinée à les protéger contre les dégradations. Cette couche est généralement transparente à la lumière visible, ce qui a permis, jusqu'à présent, de faire des mesures de thermoréflectance sur les matériaux constitutifs des circuits intégrés au travers de cette couche. On a toutefois constaté que l'épaisseur de cette couche n'est pas complètement uniforme et qu'elle induit des interférences qui modifient la réponse du matériau situé sous elle, ce qui s'avère particulièrement gênant puisque ces modifications ne sont pas uniformes sur l'ensemble de la surface du composant et/ou d'un composant à l'autre.
Le but de l'invention est donc de proposer un microscope à thermoréflectance pour la mesure de température d'un circuit intégré qui s'affranchisse des difficultés exposées plus haut.
Au lieu de considérer en effet la couche de passivation ou d'encapsulation comme une contrainte, comme un obstacle qui doit être franchi pour accéder à la mesure des matériaux qu'elle recouvre, il a été choisi d'utiliser cette couche en mesurant sa température propre qui est représentative des matériaux au contact desquels elle se trouve.
On obtient ainsi un avantage considérable en ce que la thermoréflectance d'un seul matériau est mesurée et permet d'accéder à la température des composants qu'elle recouvre quelle qu'en soit la nature. Pour ce faire, puisque la couche de passivation n'a plus à être traversée, on effectue la mesure dans un domaine spectral où cette couche est suffisamment opaque ou quasi opaque, ce qui, pour les matériaux les plus utilisés pour la formation des couches de passivation, peut être un domaine situé dans l'ultraviolet. On obtient ainsi un deuxième avantage qui est l'amélioration de la résolution spatiale de la mesure.
Ainsi, l'invention (un microscope à thermoréflectance pour la mesure de la température de circuits intégrés) s'adresse à des circuits recouverts d'une couche de passivation.
Cette couche peut être une couche habituellement utilisée dans le cadre de la fabrication du circuit intégré considéré ou peut, dans certains cas, être ajoutée à dessein pour la réalisation de la mesure.
Ce microscope comporte une source lumineuse émettant dans un domaine de longueur d'onde (λi, λ2), un système optique de focalisation, des moyens de détection.
Selon l'invention, la couche de passivation est suffisamment opaque dans le domaine spectral (λi, λ2).
Dans différents modes de réalisation susceptibles d'être combinés et présentant chacun leurs avantages spécifiques, le microscope de l'invention présente les caractéristiques non limitatives suivantes :
- le domaine spectral (λ1 t λ2) est dans l'ultraviolet, - la couche de passivation contient du nitrure de silicium Si3N4 et la source est une source émettant dans un domaine spectral (λ-ι, λ2) compris entre 150 et 300 nm,
- la couche de passivation contient de la silice Si02 et la source est une source émettant dans un domaine spectral (λi, λ2) compris entre 150 et 200 nm,
- la source lumineuse est un laser,
- les moyens de détection sont des moyens de détection monocanal et le microscope à thermoréflectance comporte des moyens de déplacement du circuit par rapport au système optique de focalisation, - la température à mesurer est modulée à une fréquence Fi par l'alimentation du circuit intégré,
- les moyens de détection sont synchrones,
- la détection synchrone a pour référence un multiple de la différence des fréquences d'alimentation de la source lumineuse et de la fréquence de modulation du circuit,
- les moyens de détection sont des moyens multicanal (caméra, acquisition et traitement des images),
- les moyens de détection sont des moyens de détection multicanal hétérodyne (alimentation du circuit à une fréquence F1 , de la source à F1 + f et fréquence de détection au moins égale à 3f).
L'invention sera décrite plus en détail en référence aux dessins annexés dans lesquels :
- la figure 1 est une représentation schématique d'un premier mode de réalisation d'un microscope à thermoréflectance monocanal selon l'invention ; - la figure 2 est une représentation schématique d'un deuxième mode de réalisation d'un microscope à thermoréflectance monocanal selon l'invention ;
- la figure 3 est une représentation schématique de réalisation d'un microscope à thermoréflectance monocanal selon l'invention, en fonctionnement hétérodyne ;
- la figure 4 est une représentation schématique d'un microscope à thermoréflectance multicanal selon l'invention ;
- la figure 5 est une représentation schématique d'un microscope à thermoréflectance multicanal selon l'invention en fonctionnement hétérodyne.
Plus précisément, la figure 1 représente la mise en œuvre de l'invention par une mesure point à point et avec une détection synchrone. Le circuit intégré 1 est recouvert d'une couche de passivation 2.
La couche de passivation 2 est éclairée par une source lumineuse 3, par exemple et de manière non limitative un laser Ti : saphir émettant un faisceau centré sur une longueur d'onde λ = 750 nm, divisée par trois de sorte à obtenir un faisceau centré sur la longueur d'onde λ = 250 nm. Une optique 4, par exemple et de manière non limitative une lentille de silice fondue, focalise ce faisceau sur un point de la couche de passivation 2. Le flux réfléchi par la couche de passivation 2 est collecté par une optique 5 qui le focalise sur un photodétecteur 6. L'optique de collecte 5 peut également et de manière non limitative être une lentille de silice fondue et le photodétecteur 6, une photodiode au silicium.
Le circuit intégré est alimenté par une ou plusieurs tensions fournies par l'alimentation 7 dont l'une au moins est modulée à une fréquence Fi et sert de référence à la détection synchrone 8 qui fournit le résultat de la mesure à une unité de traitement 9. La modulation de la tension engendre la modulation de la température à mesurer. L'unité de traitement 9 recueille donc le résultat de la mesure pour chacun des points mesurés et est susceptible, après traitement, de fournir une image thermique de la couche de passivation et donc en fait du circuit intégré.
Cette image a la résolution permise par l'utilisation d'une source ultraviolette et peut être étalonnée en température après un calibrage des seules propriétés de thermoréflectance de la couche de passivation.
La figure 2 représente un autre mode de réalisation de l'invention mettant en œuvre une optique d'illumination et de collecte constituée par un système optique de focalisation 10, un cube séparateur de polarisation 11, une lame quart d'onde 12 dont les axes sont à 45° des directions de polarisation produites par le cube 11 , et une optique de focalisation 13.
Ainsi, la couche de passivation 2 est éclairée au travers du système de focalisation 10 par une lumière polarisée et l'intégralité de la lumière qu'elle réfléchit est dirigée grâce au cube séparateur de polarisation 11 au travers de l'optique de focalisation 13 vers le photodétecteur 6. Les montages des figures 1 et 2 peuvent être dotés d'un photodétecteur rapide et permettent de travailler avec des fréquences de détection allant du hertz et pouvant dépasser le mégahertz. Ils permettent d'obtenir ainsi une sensibilité de la mesure sur la variation relative du coefficient de réflexion ΔR/R de l'ordre de 10"6. La figure 3 est une représentation schématique de la mise en œuvre de l'invention utilisant un fonctionnement hétérodyne et un détecteur monocanal. Dans ce cas, la source lumineuse 3 est modulée à la fréquence F-i + f par l'alimentation 14 tandis que le circuit intégré 1 présente un champ de température modulé à la fréquence Fi grâce à l'alimentation 7. Le système électronique 15 permet de synchroniser l'alimentation du circuit 7 et celle de la source lumineuse 14 et génère la fréquence différence f qui sert de référence à la détection synchrone 8.
Les figures 4 et 5 sont des représentations schématiques de la mise en œuvre de l'invention à l'aide d'une détection multicanal telle que celle conçue par certains des inventeurs de la présente demande et qui a été précédemment entièrement décrite, par exemple dans le brevet français FR-2.664.048.
La figure 4 est une représentation de cette mise en œuvre avec un déclenchement synchrone de la caméra et la figure 5 est une représentation d'un fonctionnement synchrone hétérodyne. Dans le cas de la Figure 4, la couche de passivation 2 est éclairée par la source lumineuse 3 au travers du système de focalisation 10 par réflexion sur la lame semi-réfléchissante 16.
Une caméra 17 reçoit l'image de la couche de passivation 2 au travers du système de focalisation 10. Selon les dispositions du brevet mentionné plus haut, cette caméra 17 acquiert des images à une fréquence multiple de la fréquence de modulation de la température du circuit intégré 1 et de la couche de passivation 2 produite par l'alimentation 7 du circuit intégré.
Le déclenchement de la caméra est effectué par un système de synchronisation 18 travaillant à une fréquence supérieure ou égale à 3 F-i et de préférence égale à 4 F-i.
Une unité d'acquisition et de traitement des images 19 fournit alors l'image thermique de la couche de passivation 2 et par là du circuit intégré 1.
Dans le cas de la Figure 5, la source lumineuse 3 est modulée à la fréquence F-i + f par l'alimentation 14 tandis que le circuit intégré 1 présente un champ de température modulé à la fréquence F-i, grâce à l'alimentation 7. Le système électrique 15 permet de synchroniser l'alimentation du circuit 7 et celle de la source lumineuse 14 et génère la fréquence différence f qui est multipliée par un entier supérieur ou égal à 3 et de préférence égal à 4, ladite fréquence obtenue servant à déclencher la caméra 17. Les méthodes décrites par les figures 1, 2 et 4 permettent de mesurer ou d'imager des phénomènes thermiques plus lents que les capteurs utilisés alors que les méthodes décrites par les figures 3 et 5 permettent de mesurer ou d'imager des phénomènes thermiques plus rapides que les capteurs utilisés, quelle que soit leur lenteur par rapport aux phénomènes thermiques mesurés ou imagés.
Dans les différents modes de réalisation de l'invention, on obtient donc une mesure de thermoréflectance avec la précision spatiale permise par les sources ultraviolettes et avec des opérations de calibrage extrêmement simples.